Hommes-sur-Nature

L’histoire est le gardien des noms de lieux, du gaulois au romain, au roman puis à la révolution, notre pays est un limon aux multiples couches qui se chevauchent, avec des particularités ci et là. Et si l’on peut y trouver une fine couche noirâtre, c’est celle de la révolution utopique de 1789, qui par sa haine de la monarchie et des privilèges changea nombre de noms de lieux avec un atroce manque d’imagination, et de respect du patrimoine. D’où la multitude de « Bellevue-trucmuche » qui heureusement n’ont été qu’une passade dans le défrichage révolutionnaire.

Malgré ces ecchymoses, il y aura eu des éclairs de génie, tel le calendrier républicain qui tenait compte des aléas naturels saisonniers, comme ventôse qui tirait son nom « des giboulées qui ont lieu, & du vent qui vient sécher la terre de février en mars ».

De nombreux noms de rue en ont découlé, dans une utilisation hélas prémonitoire de l’industrialisation aveugle, c’est à dire d’une manière plus ou moins pertinente.

En dehors de ce rationalisme il existe de quoi nous faire rêver dans cette toponymie française, en effet, simplicité, lucidité et fraicheur peuvent surgirent là où l’on ne s’y attend pas!

Présentation de quelques noms de lieux en région Bourgogne:

Foncegrive, de fons sacriva, fontaine sacrée.

Digoin, de diwontio, lieu aux eaux sacrées.

Toulon-sur-Arroux, de tellono, nom gaulois de la source.

Île, ne désigne pas forcément une île mais un rivage, comme dans le Isle-sur-Serein.

Etalante, de stalenta, qui signifie la coquille, nom d’une source possédant cette forme.

La Bourbince, racine gauloise comme dans bourbe, associée au dieu gaulois bormo, borvo, c’est donc une rivière boueuse.

Les noues, parties de prés humides, du gaulois nauda, a donné les nocles, comme la Nocle-Maulaix.

Les Montigny, Montagny sont évidemment des hauteurs, de mont.

Pierre-perthuis, flanqué d’une pierre percée.

Les pierres du latin petra, Perreuil, Perreuse.

Les champs, Champforgueil, Grandchamp.

Les Clos, sont souvent des jardins.

Les plantes cultivées, comme le lin dans Lignières, Lignerolles.

Les terres à panais(millet), dans Panesssières.

La vigne, dans Saint-léger-des-vignes.

Chante-perdrix, des terres incultes, justes bonnes à faire chanter les perdrix.

De l’ancien français espesse, l’on a Epoisses.

Pommier, Cerisiers, Prunoy.

La Vacherie, Colombier, les Chevrières, Goupillières, Combe à la Serpent, Combe de la couleuvre.

La Chante-Raine, chante-grenouilles, lieux marécageux ou croassent les grenouilles…

Voilà, je n’en citerais pas plus, tellement il y a d’exemples mais sachez juste que toute la nature y passe, végétal, minéral, animal, etc.

Ce que je retiens personnellement comme nom et qui à lui seul vaut cet article c’est Chante-Raine, qui possède de multiples variations comme ce ruisseau de Canteraine, dans la manche où probablement nos batraciens faisaient leurs gammes.

Bien sûr la toponymie n’est remplie de certitudes loin de là, mais à juste titre elle nous permet de redécouvrir nos noms de lieux dans ce qu’ils ont parfois de plus naturels.

A lire, la collection noms de lieux aux éditions Christine Bonneton.

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  1. Bravo! Alors là, quelle bonne idée de parler de l’origine des noms de lieux!
    Ca me rappelle Jean-Louis Beaucarnot qui passait sur Europe1 le WE, il n’y a pas si longtemps à propos de généalogie de ces noms de lieux ainsi que les noms de famille! Nous l’écoutions « religieusement », car il est passionnant et passionné, donc très sympathique!
    Tu peux rajouter Fontemille ou Fontenille: les 1000 fontaines, ce qui est ravissant et la Houssaie: l’endroit où il y a du houx, etc !
    Vraiment sympa, ton article!
    Bonne journée!

  2. Bravo pour cet article très intéressant! Parfois il faut enlever différentes couches historiques pour remonter à l’origine des noms de lieux et on est surpris de voir que tel lieu aujourd’hui quasi abandonné a été habité, bonifié par nos prédécesseurs et ensuite délaissé!
    L’étude des noms de lieux se trouve à la croisée de bien des sciences et des connaissances.

  3. La Houssaie, pas mal non plus. 🙂
    Oui les fontaines, septs-fons, fontaine-les-dijons, etc.

    C’est vrai qu’avant le métro, le train, l’avion, la voiture, le gps, il y avait le cheval, la charrette, le vélo, et à l’ère du cyber-espace on devient presque ridiculement nostalgique, d’un temps où le temps ne se comptait pas.

    J’avais presque envie de faire une série photo sur les maisons abandonnées tellement il y en a, car ça fait quelque chose de voir ça, j’imagine toujours ces endroits à l’époque où ils étaient des lieux de vie.

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