Être foufou

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« Rien n’est vrai, juste ou bon, tout est vivant. »

Cela aurait pu être un koan zen, et c’est le début d’une récitation du vivant, d’une philosophie qui n’a pas besoin de démonstration, car elle a toujours œuvré depuis la nuit des temps.
Ce n’est pas sans rappelé « Rien n’est vrai, tout est permis », d’ainsi parlait Zarathoustra, le nihilisme comme réaction à tout un flot de prêches et de certitudes, un excès sauvage face à une sage illusion. Ici plus encore la référence est faite nature, amorale, areligieuse, lumière source face aux paradoxes d’une palette enfantée,  infinie et décomposée d’une complexité de couleurs, riches, car diverses.

L’histoire

La narration est faite du point de vue d’un grand rapace, le malfini (nom d’une petite buse), acteur et spectateur d’un monde impitoyable, ce prédateur est coupable et repenti, et va développer sa sagesse auprès d’un maitre dont il n’aurait jamais soupçonné même l’existence.
Un petit colibri, au comportement insensé, le Foufou, devra braver de grands dangers malgré son statut de paria et ses modestes compétences.
Dans un écosystème ilien situé dans les Antilles, on découvre des espèces peu connues en métropole comme le sucrier, le moqueur, le vonvon, etc.
L’histoire devient vite palpitante, les péripéties et les combats sont poignants et épiques.

Concepts

L’auteur étant très attaché à ses origines, je pense qu’il y a emploi ou inspiration de quelques mythes antillais, peut-être d’une antique pensée animiste. Ces mots sont aussi proches de la langue espagnole.

L’Alaya, est un choix très intéressant pour désigner ce que l’on pourrait rapprocher d’une force de vie, du guide des instincts les plus élémentaires de tout être vivant. Peut-être comparé au DAÏMÔN grec. C’est le faisceau convergent des forces qui animent un être vivant et le maintiennent en vie, par les instincts et les besoins vitaux, la faim, la soif, le sommeil, la reproduction, par extension la chasse, la parade nuptiale, ses combats et ses séductions, l’instinct maternel, etc. L’Alaya est encore dominante chez les animaux et bien chez des hommes dits civilisés…

L’Amala, autre terme révélé par le malfini, dès lors que le malfini ne fût plus prisonnier de son Alaya, il perçu l’Amala. Le « Grand océan de lumière » semble être cet amour universel pour tous les êtres qui ne peut se réaliser sans l’exil préalable de l’Alaya. L’empathie, qui est un terme très en vogue, désigne certainement ce passage où l’être n’écoute plus son Alaya personnel pour atteindre une compassion plus consciente.

L’auteur

Patrick Chamoiseau est un écrivain français originaire de la Martinique(surnommée l’ile aux fleurs), auteur engagé et poète de l’écologie, son livre est un clin d’œil à Pierre Rabhi et à son « mouvement colibri ».

Je remercie chaleureusement une grande fofolle, Noushka pour ce judicieux conseil de lecture !

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  1. Une lecture bien tentante… J’avais bien aimé son Esclave vieil homme et le molosse, poétique, beau et triste à la fois. Cela faisait partie des lectures obligées en fac de lettres, je crois que le thème était le labyrinthe, il y avait donc aussi un Jorge Luis Borges et l’Emploi du temps de Michel Butor. Je n’ai aimé que le livre de Chamoiseau même si le thème en lui même était intéréssant à étudier.
    Merci pour ce partage, l’analyse et belle journée! 🙂

  2. C’est presque dédié ESpaeth aux personnes qui comme nous observent le monde sous un angle qui peut nous faire passer pour des ovnis, je pense que tu peux te laisser aller, c’est familier.

    Ah mes excuses, j’aurais dû m’en douter Noushka, je crois que je l’aurais pas fais si je l’avais su, j’ai horreur de voir traiter deux fois la même chose !
    Oui il faut y revenir de temps en temps le texte est parfois assez costaud pour que l’on puisse redécouvrir quelque chose que l’on avait pas vu, et surtout l’aspect philosophique.

    Bonne journée à vous, bizz !

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