Le monde de Sophie

Présentation du livre

L’écrivain

L’auteur est Jostein Gaarder, un professeur norvégien de philosophie et d’histoire des idées à l’Université de Bergen.
On peut lire dans sa biographie que sa mère est autrice de livre pour enfants.
Ce livre fut un grand succès dans son pays et à l’étranger.

Créateur d’une fondation dédiée à la défense de l’environnement, la fondation Sophie, qui a décerné en 2012 un prix à Éva Joly. L’auteur s’interroge sur les enjeux du monde contemporain par le prisme de la philosophie.

Son nouveau livre, qui parait ce mois, Det er vi som er her nå(que l’on pourrait peut-être traduire par « c’est nous qui en sommes là maintenant »), est dans la continuité de sa démarche.

Le roman

C’est un roman didactique sur l’histoire des idées en philosophie, avec deux trames de récit imbriquées l’une dans l’autre.
D’une part une fiction dont le personnage principal est une adolescente face aux questions philosophiques d’un homme mystérieux.
Et d’autre part un véritable cours d’histoire sur les philosophes qui tend à rendre compréhensible l’évolution culturelle philosophique de l’antiquité à nos jours.
Mais le monde de Sophie n’est pas seulement qu’un excellent ouvrage pour s’initier à la philosophie, c’est aussi un roman avec sa pierre d’achoppement singulière. Pour nous faire trébucher hors du commun, comme n’importe quelle œuvre à succès.

L’histoire

Les personnages

La seule qualité requise pour devenir un bon philosophe est de s’étonner.

Sophie est une jeune adolescente de 15 ans, qui commence à recevoir d’étranges questions anonymes dans sa boite aux lettres comme « qui es-tu », « d’où vient le monde », etc.
Intriguée, elle se prend au jeu de la réflexion et reçoit dans de grandes enveloppes jaunes des cours de philosophie.
Son expéditeur reste mystérieux sur son identité.
Mais les échanges entre Sophie et ce dernier seront tout de même de moins en moins distants au fil de l’histoire.
Tout commence par des questions sur la nature du monde qui nous entoure, aux prémisses de la philosophie avec Socrate, Platon, et d’autres.

Les bases de la philosophie

Les philosophes affirment que l’homme ne vit pas seulement de pain.
Tous les hommes ont évidemment besoin de nourriture.
Et aussi d’amour et de tendresse.
Mais il y a autre chose dont nous avons besoin: c’est de savoir qui nous sommes et pourquoi nous vivons.

Même si de nos jours, notre enseignement moderne semble expliquer beaucoup de choses, il est très sain de débuter par le commencement. Lorsque nos ancêtres n’avaient pratiquement que leur capacité à raisonner pour éclairer ce monde qu’ils cherchaient à comprendre, sans outils ni technologie ou très peu.
Même si cela impliquait des erreurs, des contradictions, des corrections, etc.
Notre monde actuel repose sur une longue histoire des idées qui n’a jamais cessé de façonner l’évolution de ses paradigmes.

Les thèmes abordés

Nous ne vivons pas seulement à notre époque. Nous portons toute notre histoire avec nous.

Pour en revenir aux philosophes de la nature, toutes les théories possibles engendrèrent divers courants philosophiques.
Ils semblaient tous répondre à une tentative d’explication du monde, ensuite Sophie est initiée à une philosophie un peu plus introspective avec le néoplatonisme, l’épicurisme et la mystique.
C’est un passage moins matérialiste qui met en valeur l’ouverture de l’esprit.
Il me semble là que la mystique est la philosophie des sens, l’intuition, l’émotion, sont tout autant d’outils que la raison.
Je trouve cela très intéressant, et je pense que le lecteur sera inspiré par cela.
Le passage sur la pilule bleue et la pilule rouge fait penser au film Matrix, et ce n’est pas le seul parallèle avec ce dernier que l’on puisse faire d’ailleurs.
Sophie aborde ensuite le sujet du christianisme, sous un angle rafraichissant et intéressant.
Tout aussi passionnants les philosophes qui suivent, Hume, Descartes, Locke, Kant, etc.
L’époque contemporaine avec Sartre et Freud est aussi très intéressante.

Sur l’irrationnel

« Non j’ai la conviction qu’il n’existe qu’une seule nature. Mais elle est en revanche tout à fait étonnante. »

(J’ajouterais personnellement qu’elle est suffisamment étonnante pour permettre l’existence d’un corbeau blanc.)

Il s’ensuit un paragraphe sur l’irrationnel qui fait preuve d’un point de vue assez équilibré.
Même si la philosophie de l’auteur à ce sujet me parait trop rigoureuse et quelque peu dogmatique à l’instar de celle de Saint Augustin.
Je pense que tout comme le monde du vivant est composé d’organismes multiples et diversement complexes.
Le monde théorique possède lui aussi des idées modernes et archaïques qui cohabitent.
Ce qui ne préjuge pas de leur valeur puisque toutes ont trouvé leur place à un moment de l’histoire.
Le New Age est par nature une spiritualité comme toutes les autres, faite de syncrétisme, de nouveaux paradigmes et d’un aspect populaire.
Il est possible d’y voir des philosophies déconnectées de leurs sources inspiratrices, mais pour beaucoup c’est le moyen le plus accessible de vivre une spiritualité alternative.

Embarquement final

Sartre pense que la vie doit prendre un sens. C’est un impératif. Mais c’est à nous de donner un sens à notre propre vie. Exister, c’est créer sa propre existence.

S’il est possible de trouver l’histoire de Sophie superflue ou agaçante, il serait néanmoins dommage de s’arrêter sur ce préjugé, car c’est précisément que l’auteur souhaite nous mener.
Bien au-delà d’un simple manuel de philosophie, le message philosophique se situe plus dans la fiction présente que dans l’histoire docte des philosophes.
Avec une mise en abime d’une grande profondeur, l’auteur étonne et nous donne matière à penser.

Le besoin de partage et de transmission est le fil conducteur de tout(e) philosophe qui comme un batelier sait percevoir les pièges du fleuve des idées.
Si chacun mène sa barque, son expérience et sa manière de penser est une inspiration pour éviter les écueils et garder le cap.
Réenchanter, discerner et s’interroger, chacun saura trouver des clés vers une plus grande liberté, de penser.

Le monde de Sophie est une lecture intéressante, suffisamment stimulante pour avoir envie d’approfondir la connaissance des pensées de philosophes que je ne connaissais pas. Ou pour réfléchir au concept même de philosophie.
Je remercie Blandine pour m’avoir conseillé et prêter ce livre.

Liens

Fiche du livre sur babelio.

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  1. bonjour Fabrice. J’ai lu votre  » billet » et vous en félicite mais je ne suis pas assez.. pour y apporter mon grain. Cette phrase me correspond : « Il me semble là que la mystique est la philosophie des sens, l’intuition, l’émotion, sont tout autant d’outils que la raison. » Je ne me sens libre que lorsque je m’en tiens, là.. Je vais voir vos herbes folles, j’en suis une.

    • Bonjour Françoise,
      Vous apportez votre grain l’air de rien.
      Il est vrai que le livre reste axé sur la dialectique.
      Epicure se rapproche le plus d’une philosophie « simple », subtile et profonde, sans ornement ni démonstration.
      J’ai un penchant aussi pour cette attitude.

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